Pilier européen des droits sociaux : de bons principes mais plusieurs doutes

La CES salue la proposition de pilier des droits sociaux, une initiative ambitieuse lancée aujourd’hui par la Commission européenne qui inclut de nombreux bons principes.

En même temps, la CES émet quelques doutes quant à savoir où et comment ces principes seront mis en œuvre ainsi que par rapport à certaines politiques discréditées telles que la flexicurité qui risquent de susciter la méfiance des travailleurs concernant cette initiative pourtant bien nécessaire.

« La Commission européenne a publié une ambitieuse liste de principes dont nombreux sont ceux que nous pouvons soutenir », a déclaré Luca Visentini, Secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats (CES). « Nous nous posons toutefois la question de savoir comment et où de tels principes seront mis en œuvre. Au stade actuel, la Commission ne semble pas suggérer quoi que ce soit de contraignant, ce qui n’est pas de nature à rendre ce pilier très solide. La CES aurait très difficile à accepter que des droits s’appliquent uniquement aux citoyens de la zone euro et pas aux travailleurs du reste de l’UE. »

La CES s’interroge sur la manière dont fonctionneront les protections compte tenu du manque de base juridique pour les droits sociaux qui semblent surtout être d’application pour la zone euro.

La CES a en outre de sérieux doutes sur une partie de ce qui constitue le projet de pilier social, en ce compris :

  • La « flexicurité » qui, par le passé, tendait à se traduire par plus de flexibilité et moins de sécurité ;
  • Il n'y a pas assez de protection et de promotion de la négociation collective et du dialogue social ainsi qu’à la négociation collective comme moyen pour établir de justes salaires ;
  • La proposition de réexaminer l’entièreté de l’acquis social (soit toute la législation sociale) sachant que les révisions menées par la Commission au titre des programmes « REFIT » et « Mieux légiférer » ont affaibli plutôt qu’amélioré les droits sociaux ;
  • Les contraintes affectant les finances publiques sont souvent abordées mais la nécessité de systèmes de protection sociale et de services publics adéquats, universels et de qualité doivent être clairement mentionnés ;
  • Le manque de certitude quant au fait que des normes plus exigeantes en vigueur dans certains pays ne seront pas affectées par la convergence.

« Après des années de crise, de chômage élevé et d’austérité, une nouvelle initiative pour les droits sociaux est fort bienvenue », ajoute Visentini. « Pour le moment, il reste cependant trop de questions et trop de doutes pour pleinement évaluer l’annonce faite aujourd’hui. La CES participera activement à la consultation et à la discussion avec les gouvernements, la Commission et les eurodéputés afin d’arriver au meilleur résultat possible pour les travailleurs. Elle demande aussi à la Commission d’organiser une consultation particulière avec les partenaires sociaux qui sont les acteurs les plus représentatifs du marché du travail et de la société. »

Note aux éditeurs :

La communication de la Commission précise que « le pilier doit devenir un cadre de référence pour évaluer les performances des États membres participants en matière d’emploi et de social, pour mener les réformes au niveau national et, plus particulièrement, pour orienter les nouvelles mesures de convergence au sein de la zone euro. »