Résolution de la CES pour une stratégie européenne efficace de lutte contre la pauvreté
Adoptée lors de la réunion du Comité exécutif des 19 et 20 novembre 2025
Depuis 2019, la CES plaide en faveur d'une stratégie européenne forte de lutte contre la pauvreté, qui servirait de cadre global à des initiatives cohérentes et ambitieuses visant à éradiquer la pauvreté et à garantir une économie sociale de marché équitable. Le contrat social renouvelé de l'UE doit être fondé sur la paix, la justice sociale et la dignité du travail.
Afin de répondre aux ambitions de la stratégie européenne de lutte contre la pauvreté (SLP), la CES appelle à la mise en œuvre cohérente et efficace des mesures déjà identifiées et des nouvelles mesures, ainsi qu'à l'allocation des ressources nécessaires pour des emplois de qualité, le progrès social et la lutte contre la pauvreté dans le prochain CFP.
Il est temps de prendre des mesures concrètes pour garantir le plein respect des droits humains et sociaux et éliminer la pauvreté, comme l'a précisé la CES lors de l'audition des partenaires sociaux et dans son appel à contributions en ligne.
La CES demande donc instamment que la SLP englobe :
- Un engagement effectif accompagné d'initiatives fortes pour mettre fin à la pauvreté au travail, en garantissant des augmentations salariales, des salaires minimums légaux plus élevés et des négociations collectives plus fortes. La CES demande également une application plus efficace de la législation pour lutter contre le travail non rémunéré, ainsi qu'une action de l'UE pour lutter contre l'exploitation extrême et le travail précaire et incertain ;
- Une feuille de route et des mesures ambitieuses en faveur de l'emploi de qualité, prévoyant les initiatives législatives et les investissements nécessaires pour créer des emplois de qualité dans toutes les régions et tous les secteurs, renforcées par une politique industrielle renouvelée visant à soutenir la croissance et la convergence socio-économique ascendante. Des mesures législatives doivent être adoptées afin d'améliorer les conditions de travail et la qualité des emplois dans tous les secteurs et toutes les régions (ANNEXE), afin de garantir que personne, à aucun stade de sa vie, ne reste vulnérable malgré le fait qu'il ait un emploi (ANNEXE), et de garantir une protection sociale équitable, efficace et solidaire grâce à des prestations adéquates en cas de besoin ;
- La mise en œuvre intégrale du SEDS. La CES appelle à une mise en œuvre ambitieuse et holistique des trois chapitres du SEDS, en rendant chaque droit effectif pour tous dans une approche fondée sur le cycle de vie, notamment grâce à des seuils minimaux solides de droits effectifs et à des mesures visant à garantir l'amélioration des conditions de vie et de travail. La CES demande que les ressources nécessaires soient prévues dans le futur CFP. (Voir CES , CES 2020 et 2025 Contribution de la CES au nouveau plan d'action pour poursuivre la mise en œuvre du SEDS) ;
- Des mesures fortes pour lutter contre les inégalités, condition essentielle pour combattre et prévenir la pauvreté. Des millions de personnes vivant juste au-dessus du seuil de pauvreté sont toujours exclues d'une éducation de qualité et de l'égalité des chances, y compris pour leurs enfants, ce qui perpétue la ségrégation sociale et la pauvreté intergénérationnelle (voir ANNEXE). Des outils de redistribution tels que la fiscalité progressive et la protection sociale universelle et publique permettraient à une plus grande partie de la société de bénéficier et de partager une croissance inclusive, ce qui se traduirait par une cohésion sociale et une compétitivité accrues. Le modèle social de l’UE est également essentiel à la réussite économique de l'UE ;
- Le rôle central des partenaires sociaux dans la planification, la mise en œuvre et le suivi des politiques et des investissements visant à éliminer la pauvreté, grâce à des mécanismes participatifs efficaces ;
- Des mesures adaptées pour lutter contre les vulnérabilités socio-économiques, dans le cadre de plans d'inclusion intégrés coordonnant les politiques actives en matière d'emploi et les politiques sociales (voir les conclusions des syndicats dans l'ANNEXE). Les priorités doivent se concentrer sur les enfants, les jeunes, les personnes handicapées (voir ANNEXE), les personnes atteintes de maladies chroniques (par exemple, le VIH, le cancer, etc.), les personnes issues de l'immigration et celles qui sont victimes de toute forme de discrimination (intersectionnelle). La CES demande une analyse systématique de la pauvreté due au manque d'accès à l'emploi pour ces groupes, ainsi que l'évaluation de l'efficacité des législations et des politiques en matière de prévention de la pauvreté au niveau européen et national. Des ressources fiscales doivent être disponibles pour inverser les tendances actuelles. Les femmes, qui ne constituent pas un « simple groupe » mais la moitié de la population de l'UE, sont confrontées à des désavantages persistants qui nécessitent des interventions politiques connues de longue date et une nouvelle stratégie ambitieuse en matière d'égalité entre les femmes et les hommes après 2025.
- Des services publics universels de haute qualité et des États providence. La protection sociale et les services publics réduisent les inégalités et l'impact de la pauvreté. Les stratégies budgétaires doivent permettre aux États membres de garantir ces stabilisateurs économiques et sociaux, et l'UE doit fournir un financement efficace aux territoires confrontés à des désavantages structurels. La CES demande que les recommandations du groupe de haut niveau sur l'avenir de la protection sociale et de l'État-providence dans l'UE soient intégrées dans les politiques européennes et nationales, que leur impact sur les objectifs en matière de pauvreté soit suivi et que les ressources financières nécessaires aux services publics et sociaux nationaux soient garanties par le biais du semestre européen.
- Des dispositions adéquates en matière de revenu minimum pour tous, garanties par une directive (ANNEXE). Le droit de vivre dans la dignité et l'inclusion nécessite un accès universel à des services essentiels adéquats : logement, revenus adaptés au coût de la vie, y compris après la retraite, santé et soins de longue durée. Les indicateurs permettant d'évaluer et de répondre aux besoins des personnes doivent être mis à jour afin de prendre en compte l'accès aux services essentiels, au logement (réponses de la CES aux consultations publiques), à l'aide sociale et aux services sociaux, compte tenu de leur impact sur l'efficacité des seuils minimaux, en particulier pour les personnes âgées ou vulnérables ;
- Interventions politiques et ressources fiscales pour investir dans le capital humain. Les budgets de l'UE et des États membres doivent soutenir la formation, l'intégration sur le marché du travail, le maintien dans l'emploi, le vieillissement actif, la solidarité intergénérationnelle, les services publics de l'emploi et les transitions de carrière. La CES continuera à plaider en faveur d'une gouvernance économique européenne et d’un semestre aligné sur les objectifs de la SLP. L'utilisation systématique de l'évaluation de l'impact distributif pour toutes les recommandations politiques doit être adoptée. Le tableau de bord social et le cadre de convergence sociale (voir les contributions de la CES pour 2025) doivent être mis à jour : introduire des indicateurs de qualité de l'emploi basés sur la définition de la CES des emplois de qualité ; mettre à jour la méthodologie du seuil de pauvreté afin d'y intégrer l'inflation et les coûts du logement ; adopter des méthodologies dans le nouveau plan d'action du SEDS afin d'évaluer les progrès interdépendants en matière d'inclusion sur le marché du travail, de qualité de l'emploi et de protection sociale efficace et adéquate – en particulier les pensions – en suivant des modèles tels que SociAll 2024 de la CES.
La stratégie d'action sociale de l'UE doit éclairer les cadres politiques et législatifs et les orienter de manière cohérente vers la réalisation des objectifs dès que possible.