Partout dans le monde, des gouvernements cherchent à éviter la responsabilité d'accueillir des réfugiés. Les syndicats, eux, disent aux réfugiés qu'ils sont les bienvenus.

Le monde est confronté à la crise des réfugiés la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale, mais les gouvernements les plus riches ont oublié leur histoire. Plus de 60 millions de personnes fuient la guerre, la terreur et la plus grande pauvreté.
 
Alors que 80 % des personnes déplacées restent dans les pays en développement, l’Europe et d’autres pays du G20 ne ménagent pas leurs efforts pour réduire au minimum le nombre de réfugiés qui arrivent chez eux. À l’exception de l’Allemagne et de la Suède, nous assistons à la construction de murs et à la mise en place d’opérations militaires aux frontières pour empêcher des êtres humains désespérés de venir vivre en lieu sûr. Aux États-Unis, au Canada et en Australie, les gouvernements ont proposé d’accueillir un nombre minimum de réfugiés syriens tandis qu’une insensibilité croissante s’accommode de la logique de renvoyer tous les autres.
 
Il est certes nécessaire de renforcer l’assistance à des pays comme la Grèce, l’Italie, la Jordanie, le Liban et la Turquie ; la générosité des citoyens qui ouvrent leurs portes et leurs communautés pour accueillir les réfugiés couvre d’ailleurs les gouvernements de honte. Mais payer la Turquie pour qu’elle empêche les réfugiés de venir en Europe n’est pas une solution acceptable et ne le sera jamais. Il s’agit d’une violation des droits humains fondamentaux.
 
Les personnes ne sont pas des marchandises échangeables.
 
Il ne peut y avoir d’intégration sans réinstallation. Nous exhortons les gouvernements européens à reprendre les discussions sur l’intégration et la réinstallation au lieu de dépenser toute leur énergie à fermer leurs portes. La responsabilité à l’égard des réfugiés n’est pas négociable.
 
L’accord européen conclu avec la Turquie n’est qu’une tentative hypocrite de se soustraire aux obligations internationales. De la même manière, cet accord refuse de reconnaître l’histoire du siècle dernier, lorsque les réfugiés européens étaient accueillis parmi les travailleurs de nombreuses nations, ce qui a permis, grâce au pacte social, de développer l’emploi et de faire prospérer les économies.
 
De nombreux pays, y compris en Europe, ont besoin de travailleurs pour faire face au vieillissement de leur population. Les compétences et les revenus que les réfugiés peuvent apporter aux pays d’accueil et les investissements réalisés pour les soutenir stimulent la croissance économique et la création d’emplois, au profit des réfugiés comme des populations locales. Mais cela nécessite des investissements. Il est temps que les dirigeants prêtent plus attention à l’état de l’économie ; les employeurs et les syndicats s’accordent à dire que les migrants et les réfugiés représentent une partie de la solution.
 
Mais au centre de la crise, il y a des personnes. La CSI et la CES sont indignées face au manque d’unité et d’humanité des politiques menées par les gouvernements.
 
En revanche, il est encourageant de constater que, dans presque tous les pays, la compassion des citoyens est plus forte que celle de leur gouvernement. Dans une enquête de l’organisation Tent Foundation[i] réalisée dans dix pays, 73 % des personnes interrogées reconnaissent qu’elles ont la responsabilité d’accepter des réfugiés.
 
La CSI adresse une requête aux Nations Unies, au G7 et au G20 pour soutenir le droit de vivre et de travailler en lieu sûr pour tous les migrants. Dans cette perspective, il est indispensable de mettre au point une stratégie mondiale de réinstallation reposant sur la coopération, de prévoir les fonds mondiaux nécessaires à la protection sociale ainsi que des infrastructures adaptées qui répondent aux besoins des réfugiés dans les pays d’accueil.
 
La répartition des réfugiés est essentielle afin de ne pas créer de zones qui risquent de devenir rapidement des zones de non-droit.
 
Cette solidarité qui accorde de l’importance à la vie humaine fait cruellement défaut, et la montée de la xénophobie au sein du monde politique est inquiétante. Entretenir la peur à l’égard des nouveaux arrivants parce qu’ils représenteraient une menace pour l’emploi local trahit un manque de clairvoyance ; il faut au contraire agir pour garantir l’égalité de traitement sur le lieu de travail et établir un programme sérieux pour améliorer les infrastructures, développer l’emploi et créer de la croissance afin de proposer un avenir meilleur et des opportunités pour tous.
 
Tandis que des gouvernements, partout dans le monde, cherchent à éviter la responsabilité d’accueillir des réfugiés, les syndicats disent aux réfugiés qu’ils sont les bienvenus.
 
Chaque pays démocratique peut faire mieux pour offrir un lieu sûr aux personnes en danger, mais encore faut-il que nos dirigeants agissent pour faire cesser les conflits et les déplacements de populations. Quand nous déclarons que les réfugiés sont les bienvenus, nous sommes bien conscients du fait que la plupart d’entre eux veulent la paix et la sécurité dans leur propre pays. Un effort mondial urgent pour arrêter les bombardements et assurer la démocratie en Syrie et dans les pays voisins est nécessaire, depuis longtemps.
 
 
Sharan Burrow                                     Luca Visentini
Secrétaire générale de la CSI            Secrétaire général de la CES
 
 
 


[i] Enquête mondiale de Tent Foundation réalisée en novembre 2015 auprès de populations adultes en Allemagne, en Australie, au Canada, aux États-Unis, en Grèce, en Hongrie, au Royaume-Uni, en Serbie, en Suède et en Turquie.

  

 

27.05.2016
Communiqué de presse