Résolution de la CES pour l’intégration des migrants et la consolidation du réseau UnionMigrantNet

Adoptée lors du Comité Exécutif du 2-3 juillet 2020

Synthèse

Par la présente résolution, la CES adopte une position supplémentaire pour la protection des droits des migrants et leur intégration en Europe et au-delà. Elle vise à renforcer davantage le réseau UnionMigrantNet (UMN) en tant que réseau européen de syndicats, d’organisations et d’associations de migrants promues par les syndicats. Ce réseau offre une aide aux migrants tout en affichant une double fonction : il sert d’instrument de coopération entre ses membres et représente une source d’information et d’aide pour la population migrante grâce à ses structures de conseil (points de contact).

Background

La résolution de la CES sur les pistes de travail pour la CES dans le domaine de la migration et de l’asile (2019-2023) souligne que l’intégration des migrants est le thème phare de l’agenda syndical sur la migration et l’asile.

Le réseau syndical européen UnionMigrantNet se compose de structures syndicales locales, régionales et nationales qui contribuent à l’intégration des migrants. Il s’est révélé être une excellente plate-forme pour le mouvement syndical au niveau européen en matière de sensibilisation à la question de la migration. Il s’est également avéré être un instrument efficace pour tirer parti des meilleures pratiques. En tant que réseau syndical prédominant, l’UMN a retenu l’attention des institutions et a montré une valeur ajoutée en matière de renforcement de la coopération développée par les syndicats en Europe ou avec des pays tiers.

La CES est non seulement en train de consolider ce réseau, mais elle met également à jour et relance le portail web existant, qui deviendra un point de référence pour tous les migrants et leurs structures de conseil auprès des syndicats en Europe. L’UMN peut également être renforcé pour répondre à la priorité de la CES de mieux impliquer les migrants dans la vie syndicale et les processus décisionnels.

L’UnionMigrantNet a été créé en 2015 en tant que réseau de points de contact pour les migrants. Il a été créé, géré et soutenu par les syndicats. L’UnionMigrantNet continuera à coordonner et soutenir le travail des syndicats tout en favorisant son volet de services. L’objectif principal du réseau est de soutenir la mobilité de la main-d’œuvre. Objectifs du réseau :

  • Renforcer les activités syndicales visant à protéger les droits individuels et collectifs des migrants quel que soit leur statut ;
  • Accroître la visibilité et l’accessibilité des services et installations en soutenant l’intégration des migrants dans les pays d’accueil et les communautés locales ;
  • Encourager, par le soutien et les bonnes pratiques, l’adhésion de la population migrante à un syndicat ;
  • Faciliter le dialogue et la coopération avec d’autres réseaux de syndicats régionaux spécialisés dans les activités des migrants ;
  • Encourager la coopération et le soutien aux migrants, entre tous les syndicats en Europe.

Défis

L’intégration des migrants nécessite un nouvel engagement du mouvement syndical européen. Malgré la crise répétée qui a touché la société et l'économie européennes, la population migrante a augmenté au cours de la dernière décennie. Aujourd’hui, l’UE accueille environ 22,3 millions de ressortissants de pays tiers. 63 millions de personnes nées à l’étranger (tous migrants confondus) vivent dans des pays couverts par la CES. On estime que 100 000 ressortissants de pays tiers (RPT) entrent dans l’UE pour un emploi saisonnier et la moitié d’entre eux pour moins de 90 jours. Il est difficile d’estimer combien de RPT travaillent pendant de courtes périodes après être entrés dans l’UE à l'aide d’un visa Schengen. Néanmoins, il existe encore environ 4 millions de migrants sans papiers. Ce nombre a augmenté en raison du manque de canaux réguliers transparents et de la mauvaise gestion des demandes d’asile. L’UMN estime que 7 % des membres du syndicat sont des migrants. Dans certains secteurs ou régions, les migrants peuvent aussi représenter jusqu’à 50 % des syndicats locaux ou sectoriels.

La crise du COVID-19 a montré à quel point les travailleurs migrants sont essentiels pour les secteurs des services et de la production. La précarité des non-citoyens a été davantage mise en évidence lorsque l’économie ou les systèmes de santé des pays d’accueil ont été soumis à de fortes pressions. Les secteurs les plus touchés, comme le tourisme, la construction, l’agriculture, les soins et les travaux domestiques, sont ceux qui emploient un nombre élevé de travailleurs migrants. L’accès limité à la couverture sociale crée des zones de vulnérabilité et souvent une situation de pauvreté que les mesures d’urgence peinent à gérer. Les femmes sont ainsi particulièrement exposées.

Priorités

Lors de récentes consultations avec la Commission européenne, les partenaires économiques et sociaux (qui font également partie du partenariat pour l’intégration) ont partagé l’opinion selon laquelle les mouvements de population en provenance et à destination de l’UE continueront d’exister en nombre important, malgré la situation difficile que représente l'après coronavirus. La CES affirme qu’il est nécessaire d’ouvrir des canaux juridiques bien gérés et transparents ; en outre, les permis de travail doivent être délivrés et associés à des droits et à une égalité de traitement au travail pour tous les travailleurs. La CES préconise un renforcement du partenariat pour l’intégration dans le cadre du nouveau pacte européen sur la migration et l’asile en vue d’élargir le champ d’application à la migration économique et de renouveler l’engagement avec les partenaires économiques et sociaux. Il serait ainsi possible de mieux soutenir les organisations nationales dans leurs efforts d’information, de formation, d’inclusion et de protection de tous les migrants. Le projet LABOUR-INT continuera de servir de cadre opérationnel spécifique aux demandeurs d’asile et aux réfugiés.

Le monde du travail et le travail des migrants sont étroitement liés. Avoir un emploi représente une étape très importante dans le processus d’intégration. L’adhésion à un syndicat contribue à assurer l’intégrité et la dignité des migrants. Toutefois, nous sommes conscients que l’UE connaîtra des périodes de chômage intense. Cette situation peut exacerber les positions défensives visant à protéger les marchés du travail locaux. Dans le contexte de la crise d'après coronavirus, nous pouvons nous attendre à ce que la position des migrants économiques nécessite une plus grande attention de la part du mouvement syndical afin d’éviter les effets de distorsion sur le marché du travail, d’assurer leur séjour régulier, de défendre leurs intérêts en tant que travailleurs lorsqu’ils sont impliqués dans la crise, avec les mêmes conditions que les ressortissants nationaux.
 

Actions

Cette résolution vise à inciter tous les membres de la CES à renforcer la coopération destinée à consolider leurs activités en faveur de l’intégration des migrants, y compris celles réalisées par les fédérations représentant les secteurs dans lesquels les migrants sont très présents.   Elle se concentre en particulier sur les réseaux et services qui contribuent à l’intégration des migrants. La participation se fait sur base volontaire et peut prendre différentes formes en fonction du champ d’application, des objectifs ou encore des ressources. Les actions doivent cependant être adaptées aux réalités locales. Autant de pratiques dont le mouvement syndical devrait tirer parti.

Nous avons également appris que l’échange de pratiques et la mise en réseau transfrontalière présentent des avantages tant pour les syndicats que pour les migrants. Les membres de la CES bénéficient de l’échange d’expériences et d’activités d’apprentissage mutuel. De plus, ils élargissent l’offre d’aide transfrontalière proposée à leurs membres. Ils bénéficient en outre d’une position plus forte du mouvement syndical dans l’arène politique.

Les services et réseaux mis en place par les membres de la CES joueront un rôle essentiel dans la gestion équitable de la migration et dans la garantie d’un niveau élevé d’intégration de la population migrante. Le réseau UnionMigrantNet prouve que lorsque les syndicats investissent dans des services d’intégration de migrants, ils deviennent un point de référence pour la population locale. De plus, leur valeur ajoutée est reconnue non seulement par les migrants, mais aussi par toutes les instances des communautés locales, y compris leurs autorités administratives.

Le réseau UnionMigrantNet est également très utile pour les migrants, car il augmente la visibilité des structures syndicales auprès des migrants et leur accessibilité, en particulier en dehors du lieu de travail. L’UMN crée des opportunités transfrontalières en matière de services de conseil afin que les migrants qui décident de passer d’un État membre à un autre puissent profiter d’un meilleur soutien et bénéficier d’une continuité en termes de soutien syndical dans leurs nouvelles démarches.

L’UnionMigrantNet est également un réseau de réseaux et de services œuvrant pour l’intégration des migrants. Il est proposé ou soutenu par les syndicats présents dans l’UE et au-delà. Il continuera à assurer deux fonctions : être un instrument de coopération et d’échange entre les membres de la CES et les structures de conseil (points de contact) ainsi qu’un élément de service pour les migrants, notamment par son portail qui a été relancé www.unionmigrantnet.eu.

Le portail de l’UMN doit répondre aux objectifs suivants :

  • Renforcer la coopération entre les membres de la CES par le biais de services et d’une aide à l’intégration des migrants. Ces syndicats développeront une coopération et des échanges mutuels, en mettant également en relation le personnel local, par le biais d’événements ciblés (conférences, formations, séminaires, échange de matériel) et par le biais du portail UMN qui comportera une section réservée aux opérateurs syndicaux. Dans ces sections réservées, il leur sera possible de développer des outils de travail communs. L’UMN sera ouvert à tous les membres de la CES et à leurs structures de conseil. L’UMN a pour objectif l’inclusion active et continue de toutes les organisations syndicales concernées dans ce domaine.
  • Favoriser les conditions d’un dialogue sur la question de la reconnaissance mutuelle de l’appartenance syndicale. Sur la base d’une charte de valeurs commune, l’UMN peut faciliter l’accès au soutien syndical aux travailleurs qui décident de se déplacer d’un pays à un autre.
  • Accroître la visibilité des structures de conseil/points de contact syndicaux, grâce à une géolocalisation des bureaux syndicaux les plus proches ou des bureaux d’assistance aux migrants par le biais d’un portail web et d’une application mobile. Définie comme un outil multilingue, l’application aura accès à de nombreux points de contact qui pourront être triés en fonction de leur localisation, des langues parlées et des services proposés.
  • Les services en ligne pourront être testés dans le cadre d’un nombre limité d’actions pilotes auxquelles participeront des syndicats, des associations ou des organisations soutenues par des syndicats. Il sera possible d’établir des plans de faisabilité sur la base de ces actions pilotes. Une approche participative sera encouragée, ainsi que la participation des migrants eux-mêmes. Cette organisation permettra de développer un portail et une application mobile qui serviront d’outils concrets et utiles pour les migrants.

Plus les syndicats sont actifs, plus l’UMN est puissant. La CES encouragera la participation par le biais des initiatives suivantes :

  • Conférence des points de contact syndicaux pour l’intégration des migrants
  • Organisation de formations et d’échanges d’apprentissage mutuels également en coopération avec l’ETUI
  • Développement du matériel ou soutien de l’échange de matériel produit par les membres de la CES
  • Utilisation de l’UMN comme portail, comme carrefour des services syndicaux aux migrants
  • Progression vers une reconnaissance mutuelle des membres pour les personnes qui tirent parti du potentiel du portail de l’UMN

La gouvernance du réseau sera développée en coopération avec les membres du Comité de direction du projet de l’UMN et le Comité permanent de la CES sur la migration et l’inclusion.

Cette résolution met en œuvre l’un des objectifs de la résolution de la CES sur les pistes de travail pour la CES dans le domaine de la migration et de l’asile (2019-2023). La CES continuera à travailler au niveau politique afin de faire pression pour un environnement plus favorable à l’intégration et à la protection des droits des migrants, indépendamment de leur statut d’immigration ou de leur nationalité.